L’aérodrome d’Agathazell, près de Sonthofen, dans l’Allgäu, s’extirpe tout juste de l’obscurité tandis que nous préparons nos moteurs pour le départ. À cette heure-ci, le vent de montagne domine encore et les conditions de décollage sont idéales pour nous. Malgré nos réservoirs remplis à ras-bord, nous quittons le sol sans problème après seulement quelques pas.
Notre plan, c’était de survoler la vallée de Tannheim et le lac de Haldensee à basse altitude avec le vent d’ouest, jusqu’à la vallée de Lech, puis de rallier directement le lac d’Eibsee, au pied de la Zugspitze, via Reutte et le lac de Plansee. Face aux flancs de la falaise de la plus haute montagne d’Allemagne, nous voulions ensuite revenir à Reutte avec le vent d’est, en altitude, puis rallier deux châteaux dignes de conte de fées, Neuschwanstein et Hohenschwangau, et revenir à Agathazell par les lacs d’Alpsee et de Forggensee, près de Füssen.
Mais rien ne s’est vraiment passé comme prévu. Le vent froid qui descend de la montagne et ne constitue d’habitude qu’une couche de quelques centaines de mètres monte à près de 1500 m ! Notre vitesse/sol est en conséquence, bloquée à un chiffre. Les minutes s’écoulent péniblement. Puis nous plongeons enfin dans une autre masse d’air. Le vent d’ouest nous porte rapidement par-delà la vallée de Tannheim et le lac de Haldensee jusqu’à la vallée de Lech. Même à faible altitude, ça progresse bien, maintenant. Nous atteignons Reutte, dans le Tyrol, et volons vers le lac de Plansee, le passage clé du projet. La vallée dans laquelle se trouve le lac de Plansee est étroite et très boisée, les berges sont peu adaptées à un atterrissage. Nous décidons de prendre le risque.
Mais nous devons soudain faire demi-tour. Un banc nuageux à basse altitude nous bloque la route vers le lac d’Eibsee ! Plan B. Nous faisons un détour par le lac de Heiterwangersee afin d’atteindre le lac d’Eibsee via Leermoos et Ehrwald. Sachant pertinemment que notre consommation va augmenter, ce qui met notre projet en péril…
Pourtant, le vent de vallée et de notre côté, maintenant. Filant parfois à 70 km/h, nous sommes plus rapides que les nombreux vacanciers dans leurs voitures, sous nos pieds. Finalement, le lac d’Eibsee apparaît – un paysage lacustre vraiment merveilleux, avec ses couleurs qui paraissent surréelles et les nuages qui se reflètent dans le miroir de sa surface lisse.
Huit petites îles brillent d’un vert turquoise, dû aux eaux peu profondes qui les entourent, au milieu d’une eau bleu foncé. Leur origine remonte à 3400 ans. Lors d’un éboulement, d’immenses blocs de pierre ont été précipités dans le lac. L’énergie qui s’est alors dégagée est estimée à 2.9 mégatonnes de TNT.
Après deux survols, c’est fini. La jauge du réservoir indique 4.2 litres – il est temps de rentrer ! Le retour va prendre deux bonnes heures. Nous remontons et sommes heureux de voir que le lac de Plansee est maintenant dégagé ! Nous reprenons espoir : dans le courant d’est, en altitude, et avec un minimum de gaz, nous devrions pouvoir rallier Reutte et poursuivre vers Füssen et nos deux derniers lacs, l’Alpsee et son merveilleux château Neuschwanstein, et le Forggensee aux couleurs émeraudes.
Ici, le calculateur d’approche du vario indique encore une heure de vol. Contre le vent d’ouest, à une vitesse toujours en-dessous de 30 km/h et avec seulement 2.5 litres dans le réservoir, ça risque d’être juste…
Mais le dieu de la météo est avec nous. Le ciel se dégage et les thermiques nous permettent d’économiser de l’essence. Avec des pompes allant jusqu’à 4 m/s, nous glissons, moteur parfois au ralenti, jusqu’à l’aérodrome. La sensation qui s’empare de nous est incroyable – comme si nous sortions d’un rêve.
De l’aérodrome d’Agathazell, dans l’Allgäu, à la vallée de Lech, via la vallée de Tannheim et le lac de Haldensee. De Reutte jusqu’au lac d’Eibsee, au pied de la Zugspitze, via le lac de Heiterwangersee. Passage par le lac de Plansee et le château Neuschwanstein, puis retour à Agathazell via les lacs d’Alpsee et de Forggensee. 140 km, env. 5 heures de vol.
Le parcours n’est pas simple pour les paramoteurs. Les systèmes de vents de vallée, à cette époque, sont très marqués et exigent une grande expérience pour évaluer les zones au vent et sous le vent. Adi et son team ont profité des systèmes de vent pour venir à bout du parcours complet sans escale.
Robert est un des tout premiers pilotes allemands. Il a gagné le championnat XC allemand en 2013 et détient le record allemand du triangle FAI avec 287 km. Quand il le peut, il aime voyager dans des contrées lointaines à la recherche de territoires inconnus.
Melanie a découvert le parapente il y a sept ans. En tant que pilote de Marche & Vol, de paramoteur et de vol de distance, elle aime explorer de nouveaux domaines de vol, et s’est ainsi retrouvée dans ce voyage de découverte.
Le parapente est la profession de Michi. Il est un pilote de compétition expérimenté et dirige l'équipe de test chez ADVANCE.